La révolte paysanne n’est pas qu’un feu de paille
Elle pourrait embraser tout le pays.
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Lorsque des agriculteurs qui travaillent beaucoup plus de 35 heures par
semaine ne trouvent plus dans leur activité, la vente de produits évidemment
indispensables à la vie, mais aussi l’entretien de nos paysages, une source de
revenus acceptables et que beaucoup sont surendettés pour répondre aux
exigences de la concurrence, mais aussi à l’accumulation de normes que notre
administration fait appliquer avec zèle, la révolte éclate avec une brutalité
que seul un gouvernement désinvolte pouvait ne pas prévoir.
L’année dernière, les intermittents du spectacle avaient obtenu le maintien
de leurs avantages en perturbant les festivals de l’été.
Cette année, les
paysans ont amené le pouvoir à Canossa en fermant la route des vacances.
Dans
les deux cas, des Français ou des étrangers bienvenus – les touristes – ont
servi d’otages.
Dans les deux cas, l’intérêt catégoriel n’a fait aucun cas de
l’image du pays et de l’intérêt général.
La loi et l’ordre ont été, comme le
veut une habitude nationale, bafoués par des actions contre lesquelles le
gouvernement n’a même pas osé réagir alors qu’elles portent atteinte à des
piliers de notre droit : la liberté de circuler ou la propriété.
La
compréhension relative des Français revenait à dire : ils ont raison, mais
ils feraient mieux de s’en prendre aux industriels, aux distributeurs et
surtout aux pouvoirs publics, plutôt qu’à nos vacances.
Le ministre a émergé d’un dialogue éprouvant pour dire qu’il fallait
garantir les prix et favoriser les produits nationaux. Cette conclusion de bon
sens accompagnée d’un plan d’urgence de 600 millions d’euros a apaisé très
momentanément la colère, mais elle revêt une fois de plus la forme d’un
expédient.
De tout temps, la France a été la première nation agricole
européenne.
Nos gouvernements successifs ont usé d’un rare talent pour nous
priver aussi de cette réussite.
Le recul de la politique agricole commune, la
fin des prix garantis et le découplage des aides et de la production visaient a
faire dépendre davantage les revenus agricoles du marché et de la vente des
produits.
Si certains produits français très spécialisés et réputés ne sont guère
menacés, en revanche la production de base est confrontée à des concurrences
étrangères qui bénéficient d’une compétitivité supérieure, comme le porc allemand
ou espagnol par rapport au breton.
Plutôt que de s’en prendre aux marges des
transformateurs ou des distributeurs, qui sont aussi des entreprises françaises
qui procurent des emplois, c’est une fois encore la compétitivité des
entreprises agricoles qui est en cause.
Le plan d’urgence est un aveu puisqu’il
comprend notamment une dotation de 50 millions d’euros au fonds d’allégement
des charges, un report de l’impôt sur le revenu, une exonération des taxes
foncières et un remboursement de la TVA.
L’agriculture est victime, comme toute
notre économie, de dépenses publiques excessives, d’une fiscalité et de
charges sociales déraisonnables.
Les États-Unis usent de protectionnisme.
L’idée de bon sens que la France
devrait, au moins pour les marchés publics, pour fournir les besoins des
collectivités territoriales et des établissements publics, faire de
même se heurte à la réglementation européenne.
Une agriculture moins
taxée, moins imposée, moins soumise à des réglementations excessives, davantage
regroupée pour négocier avec ses clients ou pour exporter, et bénéficiant d’une
préférence nationale dans le secteur public devrait permettre aux agriculteurs
de vivre et de bien vivre de leur travail et de leur savoir-faire.
Si on y
ajoute une politique plus intelligente envers la Russie, l’horizon pourrait se
dégager.
Le plan d’urgence est un ballon d’oxygène.
La révolte paysanne n’est pas
qu’un feu de paille.
Elle pourrait embraser tout le pays.
Source : Bld Voltaire
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