Il y a des comparaisons que l’on aimerait éviter, des échelles de valeurs que l’on aimerait inverser. Et puis la honte qui se rajoute au déshonneur.
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Et la République française, en ce début d’année,
s’est distinguée, en distinguant vingt victimes du terrorisme dont
quinze à titre posthume et en oubliant Aurélie Châtelain.
Morte pour rien, et morte une seconde fois.
Oubliée
de la République dont on nous rebat les oreilles avec ses valeurs
dressées au rang d’idoles, ses égalités, ses fraternités…
Mais pas d’Aurélie Châtelain parmi les
récipiendaires de la Légion d’honneur. Et pas d’honneur.
Aurélie Châtelain, en luttant avec son
agresseur, Sid Ahmed Ghlam, a permis que celui-ci se tire une balle dans
le pied et se fasse arrêter avant d’aller attaquer une église de Villejuif
remplie de fidèles.
Une rencontre « pas de chance » pour la
jeune femme et un acte de résistance au péril de sa vie, qu’elle a d’ailleurs
laissée à Villejuif ce 19 avril 2015.
Alors, jouons sur les mots et surfons sur les
distinguos.
La Légion d’honneur est faite pour distinguer les
services rendus à la République et non pas pour rendre hommage. Admettons.
Cabu, Charb et Tignous ont été faits chevaliers
de la Légion d’honneur à titre posthume, ainsi que la chroniqueuse Elsa
Cayat, le correcteur de presse Mustapha Ourrad, le journaliste Michel Renaud,
tous tués le 7 janvier dernier dans les locaux de Charlie Hebdo.
Idem, les otages de l’Hyper Cacher tués le 9
janvier, les lieutenants Franck Brinsolaro et Ahmed Merabet tués le 7 janvier
dernier et le brigadier Clarissa Jean-Philippe abattue les 8 janvier à
Montrouge : tous nommés chevaliers de la Légion d’honneur à titre
posthume.
Idem, cinq autres personnes intervenues lors de ces
différents événements dramatiques survenus en 2015. L’otage des frères
Kouachi à l’imprimerie de Dammartin-en-Goële, Michel Catalano, et son employé
Lilian Lepère, caché sous un évier.
Le conducteur du Thalys lors de l’attaque
du 21 août dernier, le chef de bord et l’universitaire américain qui s’est
interposé lors de cette même attaque.
Tous nommés chevaliers de la Légion
d’honneur.
La décence voudrait que l’on évite de hiérarchiser
les morts. De ceux qui méritent que la République les honore et des recalés de
chez Charlie.
La décence voudrait que l’on évite de penser que
déjouer un carnage dans un Thalys c’est plus méritoire que d’éviter un massacre
dans une église remplie de fidèles un dimanche.
Mais dans la petite ville du Nord, Caudry,
d’où est originaire la jeune victime, maman d’une fillette de 5 ans, cette
absence est indécente.
Elle relègue dans l’oubli une victime du terrorisme
et du fanatisme islamique.
Elle distingue les héros en fonction de leur caste
ou de l’image médiatique à renvoyer, peut-être.
Elle hiérarchise leurs
victimes.
Et rajoutons à l’indécence le ridicule.
La
promotion 2016 de la Légion d’honneur a « distingué » Emmanuelle
Béart l’actrice et Vanessa Paradis la chanteuse.
Pour Aurélie la danseuse, ce sera pour plus tard.
Anne-Sophie Désir via Bd Voltaire
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